Un parfait inconnu
You that never done nothin'
But build to destroy
You play with my world
Like it's your little toy
You put a gun in my hand
And you hide from my eyes
And you turn and run farther
When the fast bullets flyMasters of War
Bob Dylan, 1963
Internet Movie Database
Antoine Duplan pour Le Temps
Rafael Wolf pour RTS-culture
I'm not there
Wake

Lire plus…Wake est un terme polysémique.
Wake désigne le sillage, la trace d'un passage. À la surface de l'eau, au sens propre.
Ou bien, au sens figuré, la trace métaphorique d'un passage. Être, marcher, vivre dans le sillage.
Wake est aussi la veillée, et notamment la veillée funèbre.note liminaire
Le piège de l'identité
Les essais du politologue Yascha Mounk questionnent le fonctionnement des démocraties libérales et la pérennité d'un système politique qui a permis une amélioration globale des conditions de vie, sans pour autant être exempt de défauts.
Si les idéologies d'extrême droite sont si dangereuses, c'est qu'elles n'incitent personne à élargir ainsi le cercle de ceux qui méritent notre sympathie. En plaçant des identités culturelles ou ethniques particulières sur un piédestal, elles encouragent au contraire leurs adhérents à valoriser leur groupe par-dessus tout, en particulier par-dessus les droits des étrangers ou la solidarité humaine universelle. Ce que je reproche à la synthèse identitaire est que, à sa façon, elle aussi rend plus difficile d'élargir nos allégeances au-delà d'une identité particulière et d'ainsi assurer la stabilité, la solidarité et la justice sociale.
p. 25
Lire plus…
Frozen River
Elsa Duperray pour Le Temps
Fiche du cercle d'études
Internet Movie Database
Rezo films

Loving
En racontant le récit des Loving dont l'appel à la Cour suprême des États-Unis a fait progresser la dignité des colored, Nichols rappelle que les ségrégations touchent les personnes dans la banalité de leur vie.Ce n’étaient pas des martyrs et Richard et Mildred Loving ne se considéraient pas comme tels. Ils n’étaient pas non plus des symboles, et ne se considéraient pas comme tels. C’étaient deux êtres qui s’aimaient, et qui voulaient vivre ensemble et avec leur famille. »
Jeff Nichols
dossier de presse
Ce récit est aussi celui d'une opportunité – plus ou moins provoquée – qui permet des modifications législatives. Tania de Montaigne a décrit dans Noire que n'est pas Rosa Parks qui veut.
Norbert Creutz pour Le Temps
Fiche du cercle d'études
Internet Movie Database
Frenetic, dossier de presse

Entre le monde et moi
L'ombre de la peur parcourt le manifeste que Ta-Nehisi Coates adresse à son fils adolescent. Un texte dominé par la crainte de son impuissance à protéger la vie noire qu'il a engendrée, par l'appréhension que l'éducation dispensée ne le rende vulnérable.Tout ce que je souhaite, c'est que tu sois un citoyen conscient dans ce monde terrible et beau.
p. 142
Écrit woke qui exprime la révolte de ceux qui avaient cru pouvoir se fondre dans la société américaine et qui restent englués, comme le relevait Banks, dans le grand récit de la race auquel tout se rapporte.À La Mecque, j'ai constaté que nous étions cosmopolites à l'intérieur de notre nation d'exclus.
p. 65
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Mille petits riens
La complexité du racisme est telle que les hommes de loi des juridictions américaines essaieraient de l'éviter dans leurs plaidoiries. Lorsque Ruth Jefferson, sage-femme expérimentée, comparait dans une affaire de mort d'un nouveau-né, tous les éléments convergent pourtant vers une affaire où la race est déterminante : les parents sont des suprémacistes blancs qui méprisent ouvertement le soignante noire.
Lire plus…Il existe une hiérarchie de la haine et elle diffère selon les individus.
p. 61
Mark Rothko
Fondation Louis Vuitton
Eléonore Sulser pour Le Temps
Chloé Steulet pour RTS Culture
Le site de la Fondation
Déborder l'anthropologie
Musée du Quai Branly
Dépliant de visite
Noire
Porter le nom d'une personne célèbre peut être encombrant, en particulier quand on exerce le même métier. C'est le constat que fait Tania de Montaigne née pourtant près de 450 ans après son illustre homonyme.
Lire plus…Rosa Parks n'est pas Claudette Colvin, parce qu'elle est une victime indéniable, admirable, parce que, de ce fait, elle est tous les noirs. Elle est le miroir tendu, un reflet sans taches, sans ombres. Elle dit à ceux qui la soutiennent leur propre valeur, elle est « bigger than life », plus grande que la vie. Elle est tout à la fois, singulière et universelle.
p. 105
Green Book
Le guide consulté par Don pour sa tournée pianistique dans le Sud ségrégationniste en 1962 est le Green Book destiné spécifiquement aux Noirs voyageant dans les États méridionaux des USA. La comédie de Peter Farrelly et son Happy End qui résonne en conte de Noël jouent sur l'inversion des rôles attendus des protagonistes. En situant l'action en 1962, deux ans avant le Civil Rights Act, les auteurs transforment la réalité violente du racisme en scènes comiques.
Si en soi ce parti-pris permet de souligner le caractère pernicieux du racisme systémique, la chute douceâtre peut faire accroire qu'il ne s'agit que d'un mauvais cauchemar relégué au passé.
Internet Movie Database
Fiche Ciné-Feuilles
Antoine Duplan pour Le Temps
Michel Masserey et Marie-Claude Martin pour RTS Culture
Leukerbad 1951 / 2014
James Baldwin, «Un Etranger au village»; Teju Cole, «Corps noir».
En visite à Loèche-les-Bains en 2014, l'écrivain Teju Cole se retrouve dans le village fréquenté par James Baldwin au début des années 1950 et se rapporte à l'essai que ce dernier publia suite à ses séjours. Un passage dans les Alpes valaisannes qui a permis à Baldwin de prendre du recul sur sa condition de noir américain. Les cris des enfants "Neger, Neger" et la curiosité qu'il leur inspire n'expriment pas la même forme de racisme que celle qu'il ressent à New York.
«Il faut concéder à tout cela le charme d'un authentique émerveillement, dans lequel il n'y avait certes pas trace d'une méchanceté intentionnelle, mais pas non plus l'idée que j'étais humain : j'étais simplement une curiosité vivante. » Mais aujourd'hui les enfants ou les petits-enfants de ces enfants sont reliés au monde d'une tout autre façon. Peut-être entre-t-il dans leur vie une part de xénophobie ou de racisme, mais ce qui fait partie de leur vie c'est aussi Beyoncé, Drake et Meek Mill, toute cette musique dont j'entends la pulsation émaner des boîtes de nuit suisses le vendredi soir.
p. 51
Lire plus…
Jusqu'au dernier
Le train sonne le glas de l'ère des cow-boys; désormais le bétail sera transporté par wagons des plaines vers les grands abattoirs de l'Est urbanisé. Dans cette ambiance tendue, un jeune benêt qui accompagne le convoi est tué. Le shérif prétend à un accident, alors que le cow-boy cherche à découvrir la vérité…
Site de l'éditeur
Black Church
Martin Luther King Jr. sur les marches du Lincoln Memorial, USMC-09611
Vu d'Europe, le rôle de la religion dans la société étasunienne semble surdimensionné. La convocation de symboles chrétiens dans la vie politique paraît, parfois, davantage un parangon de moralité qu'une conviction profonde. Les valeurs des États-Unis restent profondément ancrées dans le christianisme et plus particulièrement dans le protestantisme établi en Nouvelle-Angleterre, comme le relevait Russell Banks dans son Amérique, notre histoire.Les paradoxes de cet attachement à la religion des esclavagistes, identique à celle de leurs victimes, apparaissent très clairement dans la ségrégation de fait des églises. Le panorama de Gates, en complément d'un documentaire diffusé sur la chaîne publique PBS, met en évidence le rôle du christianisme dans la constitution d'une identité spécifique aux populations africaines-américaines.
I think it is one of the tragedies of our nation, one of the shameful tragedies, that eleven o’clock on Sunday morning is one of the most segregated hours, if not the most segregated hours, in Christian America. I definitely think the Christian church should be integrated, and any church that stands against integration and that has a segregated body is standing against the spirit and the teachings ofJesus Christ, and it fails to be a true witness.
Martin Luther King Jr.
Interview on “Meet the Press”
17 avril 1960

Un livre de martyrs américains
La prolifique romancière américaine Oates ne craint pas de thématiser les problématiques sociales qui déchirent les États-Unis. Comme dans Sacrifice, elle essaie de dépasser les clivages qui ne peuvent que légitimer les violences.

Le martyr de William Tyndale – wikimedia
Lire plus…À l'école pastorale de Toledo, à la bibliothèque, j'avais lu ou tenté de lire le Livre des martyrs de l'Anglais John Foxe. C'était un très vieux livre des années 1500 (un temps si éloigné que je n'arrivais pas à m'imaginer quelle sorte de gens vivaient alors) qui avait été « actualisé » pour le lecteur moderne. Malgré cela, la lecture n'était pas facile. J'avais du mal à lire plus de quelques minutes d'affilée ces descriptions des supplices et des martyrs endurés par des chrétiens protestants opposés à la « papauté romaine ». […] Mais à présent il était clair que Dieu m'avait guidé. […] Je serais transporté de fierté, pensais-je, si devant un vaste auditoire l'éminent professeur Wohlman projetai un jour une photo de Luther Dunphy sur un écran et s'il parlait de moi avec admiration comme d'un martyr de la cause.
p. 125-126
La grande expérience
Titre étrange choisi par Yascha Monk pour son essai politique relatif à l'évolution déroutante des démocraties libérales occidentales. Ce "Great" m'évoque le slogan phare du trumpisme alors que l'auteur, qui se positionne au centre gauche, a une vision ambitieuse des sociétés multiethniques qui caractérisent l'Europe occidentale et l'Amérique du Nord.
Pour le citoyen d'une démocratie […] le poids démographique de son groupe affectera sa capacité à peser sur les décisions politiques. Tant qu'il sera dans la majorité, il décidera. Dès qu'il passera en minorité, en raison de l'immigration ou de toute autre forme de changement démographique, les lois qui le gouverneront pourront changer du tout au tout. La logique même de l'autogouvernance, qui pose comme impératif éternel de forger des majorités de votants du même avis, pousse le citoyen à exclure des décisions politiques qui le concernent ceux qu'il considère comme différents de lui. […] Les institutions démocratiques attisent plutôt qu'elles n'apaisent les rivalités entre communautés.
p. 15
Cette aspiration est liée à un parcours personnel orienté vers un idéal de justice. Ses ascendants juifs ont quitté la Pologne à la fin des années 1960 lorsque l'antisémitisme a été réveillé par les leaders du parti communiste. Le poids de cette identité juive lui a ensuite rendu l'Allemagne insupportable et l'a entraîné dans un parcours académique aux Etats-Unis, pays dont il a acquis la nationalité. Lire plus…
Céline
Roman inclassable, Céline nous emmène dans les paysages de l'Ouest américain. Avec son conjoint, Pete, elle y recherche Lamont, un reporter du National Geographic disparu. Heller montre beaucoup de talent à peindre les paysages côtiers de la Nouvelle-Angleterre et l'atmosphère des Parcs américains du Nord-Ouest, à l'exemple du célèbre magazine.
En plus de cette capacité à enchanter les lieux, il laisse transparaître une réelle affection dans la description de son personnage. À 68 ans, Céline est un être complexe, entre élégance bourgeoise et passions viriles pour le tir et les moteurs puissants. Malgré une santé défaillante, elle s'engage encore une fois comme détective privée pour mettre en lien une fille et son père disparu. Cette quête – une tâche pour laquelle sa réputation est excellente – ravive des souvenirs douloureux de sa jeunesse.
Le roman alterne introspection et action policière, lui conférant ce climat tout particulier.
[…] l'incident l'avait revigorée. Lui avait rendu force et rapidité. Il avait vu à quelle vitesse elle avait réagi, s'était levée au lieu de se recroqueviller, scrutant et cherchant, repérant les angles de tir protégés. Il remarqua aussi que sa respiration était plus calme, plus ample. Il était bien obligé d'en conclure que ce genre d'instant critique la rendait heureuse. De quoi être émerveillé. Enfin, peut-être.
p. 367
Le site de l'éditeur
Richard Werly pour Le Temps
Bas les masques
En 70 ans, la situation a peu évolué. La presse de qualité reste un secteur fragile et convoité par les acteurs économiques comme l'attestent, en France, les débats autour de Vincent Bolloré. Au cœur de ce film policier, Ed Hutcheson (Humphrey Bogart) tente de sauver le journal de sa vie, The Day, pour défendre la liberté d'expression.
Internet Movie Database
Présentation du film pour Ciné-Feuilles
Dalton Trumbo
Le biopic consacré à Dalton Trumbo nous rappelle que la subversion a toujours susciter pour le moins la méfiance des États, même démocratiques. En particulier la crainte viscérale du socialisme et du communisme permet à l'administration étasunienne de discréditer tout discours en faveur des oubliés de la prospérité. Dans l'élan de la Guerre froide, le sénateur du Wisconsin, Joseph McCarthy lance une véritable chasse aux sorcières contre les «ennemis de l'intérieur». Une attention particulière est dirigée contre les célébrités hollywoodiennes qui ont la capacité de focaliser l'attention du public. Le film de Roach montre que les affiliations partisanes et les relations sociales semblent mobiliser davantage les enquêteurs que le contenu des films.
Trumbo avait un don pour écrire des scénarios et, à ce titre, était très sollicité. Toutefois son affiliation au Parti communiste est rédhibitoire; ses employeurs sont victimes de représailles utilisant les mêmes topiques que les propagateurs de vérités alternatives aujourd'hui. Trumbo doit réduire drastiquement son train de vie et, pour entretenir sa famille, il enchaîne les scénarios à vil prix pour des producteurs de troisième zone qui exploitent sa faiblesse. Toutes les victimes du maccarthysme n'auront pas cette opportunité et nombreux seront acculés à l'indigence par l'interdiction de travailler.
La notoriété de Kirk Douglas et d'Otto Preminger lui permettra en 1960 de sortir de la Liste noire. Les réalisateurs de Spartacus et d'Exodus insistent en effet pour que le scénariste apparaisse au générique sous sa véritable identité. Cette reconnaissance ne signifie pas encore la fin de l'ostracisme envers les supposés ennemis de l'état qui n'interviendra qu'une dizaine d'années plus tard.
Cette situation inhérente à la Guerre froide n'était pas propre aux États-Unis comme l'«affaire des fiches» qui éclate en Suisse en 1989 l'a montré. Cette méfiance atavique des Américains envers le socialisme reste un ressort des actuelles campagnes républicaines.
Antoine Duplan pour Le Temps
Internet Movie Database
Présentation du film pour ciné-feuilles
Fiche AFCAE
Affaire des fiches – archives RTS
dhs – anticommunisme (en Suisse)
Soupçon de liberté
En se concentrant sur trois périodes déterminées de l'histoire récente de la Nouvelle-Orléans, Margaret Sexton nous propose une clé de compréhension des inégalités raciales dans le Sud étasunien. Trois générations en recherche d'une liberté si difficile à obtenir que les galères semblent inéluctables. Le contexte qui empêche de s'élever contraint-il au déclin ou des choix personnels pertinents permettraient-ils de vaincre cette fatalité ?
Aux inégalités préexistantes, viennent s'ajouter des circonstances aggravantes. En choisissant 1944, 1986 et 2010, Sexton indique les marqueurs que constituent la Seconde Guerre, la politique néolibérale de Reagan et l'ouragan Katrina en Louisiane. Lire plus…
Le silence d'Isra
Américaine d'origine palestinienne, Etaf Rum, connait la situation des femmes musulmanes de New York. Son roman, autour de trois générations de établies à Brooklyn, offre une perspective qui tranche avec la tendance française à se focaliser sur la religion islamique. Il souligne ainsi la richesse que représente les différents points de vue pour la compréhension des phénomènes sociétaux.
Lire plus…« Ce n'est pas parce que tu es née ici que tu es américaine. Tant que tu vivras au sein de cette famille, tu ne seras jamais américaine. »
p. 316
L'homme qui meurt
Leo Proudhammer est terrassé par une crise cardiaque alors qu'il est sur scène. Cet accident l'oblige à se mettre au repos et l'incite à faire le point sur sa singularité d'homme noir et homosexuel dans le milieu théâtral. Ce dispositif narratif permet à Baldwin de traiter ses thèmes de prédilection de manière moins polémique que dans ses essais... mais moins convaincante aussi !
Lire plus…
Margaret Mitchell
Parue il y a trente ans en français, la biographie de l'auteur d'Autant en emporte le vent donne une idée de l'évolution des mentalités... et des pesanteurs de la société. Alors que le roman parait dans une nouvelle traduction française, le film est retiré du catalogue de le plateforme de streaming HBO Max pour ne pas exacerber les violences raciales.
Lire plus…Peggy s'était attachée à restituer la richesse du dialecte des Noirs, sans pousser le mimétisme jusqu'à présenter au lecteur un jargon incompréhensible. Le langage adopté se voulait donc un compromis délicat entre l'« authentique petit nègre » et quelque chose qui d'un point de vue pratique ne serait pas trop indigeste pour les presses à imprimer.
p. 183
Blanc autour
Opposer un Sud raciste et esclavagiste à un Nord abolitionniste et ouvert est une lecture réductrice de la situation sociale des Etats-Unis. Le roman graphique de Wilfrid Lupano et Stéphane Fert gomme ce stéréotype.
L'histoire débute en 1832 à Canterbury, Connecticut. L'arrivée d'une nouvelle élève sème le désordre dans une école : elle est noire. Non seulement, Prudence Crandall gère-t-elle une école destinée aux filles, mais de plus elle accepte une élève noire. Une récente affaire dans le Sud avait eu un immense impact : la rébellion de Nat Turner en Virginie dont la bande tua une soixantaine de personnes, hommes, femmes et enfants, blancs. Ayant appris à lire, écrire et compter, Nat Turner lisait la Bible avec passion; il était sujet à des visions mystiques qui le menèrent à commettre ce crime. Pour la population blanche cette révolte ravive la crainte d'un soulèvement général des esclaves.
Les habitants considéraient avec raillerie l'éducation des femmes, et l'arrivée de Sarah dans la classe suscita un tollé. L'institutrice refusant de la renvoyer, c'est les parents qui retirèrent leurs filles de l'école. Persévérante, Prudence Crandall prit alors le risque de proposer son enseignement à un public de jeunes filles noires. Cette obstination a été très mal reçue par les habitants qui tentèrent diverses manœuvres légales pour interdire l'école, sans succès.
En s'inspirant de ce fait divers Wilfrid Lupano nous rappelle que le racisme et le patriarcat font durablement partie de l'histoire humaine. L'ambiance onirique des dessins de Stéphane Fert caractérisés par la forte expressivité des personnages ajoute de l'émotion à ce témoignage.
Marlène Métrailler vertigo RTS
Site de l'éditeur
La charité et l'hôpital
Ce volume n'usurpe pas le nom de la collection ! L'essai de Vincent Edin sur les limites de la défiscalisation de la philanthropie et ses conséquences pour l'État démocratique est mordant. Le titre paraîtrait inutilement accrocheur si Brigitte Macron ne patronnait pas la récolte de dons pour les hôpitaux publics de France alors que son mari justifie les restrictions budgétaires du Ministère de la Santé. En mettant en évidence la fragilité des structures de soin, la pandémie de Covid-19 montre les limites de la délégation du financement de certains services que l'on attend de l'État socio-libéral à la philanthropie. Lire plus…
Que ton règne vienne
L'enquête sociologique de Philippe Gonzalez “restitue l'ethnographie d'un objet religieux contemporain”. Cette approche permet à l'auteur de proposer un aperçu de la constellation évangélique en Suisse romande.
Ses observations détaillées l'amènent cependant à étendre sa recherche aux entrepreneurs de religion étasunien et à leur rhétorique qui influencent de manière plus active les mouvements évangéliques que les autres églises protestantes. Lire plus…
Underground Railroad
Eastman Johnson, A Ride for Liberty – The Fugitive Slaves, Brooklyn Museum – wikipedia (en)

Lire plus…Les Blancs étaient venus sur cette terre pour prendre un nouveau départ et échapper à la tyrannie de leurs maîtres, tout comme les Noirs libres avaient fui les leurs. Mais ces idéaux qu’ils revendiquaient pour eux-mêmes, ils les refusaient aux autres. Cora avait entendu maintes fois Michael réciter la Déclaration d'indépendance à la plantation Randall, sa voix flottant dans le village comme un spectre furieux.
Elle n’en comprenait pas les mots, la plupart en tout cas, mais «naissent égaux en droits» ne lui avait pas échappé. Les Blancs qui avaient écrit ça ne devaient pas tout comprendre non plus, si «tous les hommes» ne voulait pas vraiment dire tous les hommes. Pas s’ils confisquaient ce qui appartenait à autrui, qu'on puisse tenir ce bien dans sa main — comme la terre – ou non – comme la liberté.p. 160
Des vies à découvert
Barbara Kingsolver situe ce roman à Vineland, New Jersey. Ses références aux origines de cette communauté rappellent des invariants de la politique américaine, une certaine «mythologie» étasunienne.
[Les paysans] refusent de croire qu'on les a abusés en les poussant à amasser leur richesse pour les maîtres de cette ville.
– Aucun homme ne veut entendre qu'il a été un imbécile.
– Mais ils entendent, et ils persistent. Landis leur vend son contrat, ce Vineland égalitaire où tous les hommes ont la même chance, et ils lapent ça comme des chats le lait à leur écuelle. Ils sont tous pour le grand capitaine, alors qu'il les ligote et dévore leur âme et leurs biens. D'une certaine façon, il les amène à se ranger contre leur camp.
– Ils préfèrent se penser bientôt riches plutôt qu'irréversiblement pauvres.p. 329

Cinq branches de coton noir

Sente rappelle que le refus de Hitler de serrer la main de Jesse Owens aux Jeux Olympiques de Berlin est plus connu que celui du Président Franklin D. Roosevelt, en campagne pour sa réélection. La crainte que l'engagement patriotique des descendants d'esclaves nécessite une reconnaissance amène un bouleversement sociétal primait sur les considérations stratégiques à court terme. La division des tâches au sein de l'armée rend vraisemblable les discriminations racistes qui parcourent tout l'ouvrage.
Le scénario qui valorise l'engagement de Lincoln et de ses pairs en vue de réhabiliter des Afro-américains paraît cousu de fil blanc : la quête sera fructueuse. En laissant dans l'ombre les branches de coton noir, le scénariste traduit parfaitement son intention de rendre hommage “[à] tous ceux qui se sont battus pour la reconnaissance de l'égalité des races [et à] tous ceux qui, malheureusement, doivent encore le faire, aux États-Unis ou ailleurs”.
Le dessin de Cuzor entretient magnifiquement la tension dramatique et souligne l'héroïsme des protagonistes en donnant au récit un aspect véridique.
Site de l'éditeur
Soldats noirs – Troupes françaises et américaines dans les deux guerres mondiales (centre de recherches ACHAC – Association pour la Connaissance de l’Histoire de l’Afrique Coloniale)
Moissons funèbres
Le récit autobiographique de Jesmyn Ward donne un éclairage vibrant sur le racisme ordinaire aux États-Unis. En pleine vague provoquée par la mort violente de George Floyd et le flux d'images symboliques qui l'a suivie, ce texte témoigne de l'importance de l'estime de soi. Lire plus…Le privilège de recevoir une bonne éducation et la perspective de grimper un jour l’échelle sociale, je les devais aux mains de ma mère et à son inexorable coup de balai. Tout cela était injuste.
p. 230
Edward Hopper
Study of a Landscape with Train Passing Houses Whitney Museum
Cette exposition de l'artiste américain Edward Hopper (1882-1967), en partenariat avec le Whitney Museum of American Art, New York, présente une soixantaine d'œuvres en provenance, pour l'essentiel, de musées d'Outre-Atlantique.
Mon objectif en peinture a toujours été la transcription la plus exacte possible de mes impressions les plus intimes de la nature.
Edward Hopper
Notes on painting, 1933

Élégie pour un Américain
En intégrant dans son roman des extraits des Mémoires de son père à l'usage de ses proches, Siri Hustvedt, lui ajoute une forte composante autobiographique. Cette dimension est confirmée par la Chronique d'hiver de son mari, Paul Auster. Lire plus…
Chronique d'hiver
Dans sa chronique, Paul Auster fait un inventaire de sa vie. Ecrit alors que l'écrivain new-yorkais avait 64 ans, ce texte est une collection des souvenirs qui font un homme et… Lire plus…Tout livre de mémoires comporte des trous, il est évident qu on ne peut raconter certaines histoires sans faire de la peine à d’autres ou à soi même, qu’une autobiographie est sous-tendue par des questions de perspective et de connaissance de soi, des refoulements et de franches illusions.
Élégie pour un Américain
Siri Hustvedt, p. 20
Motherless Brooklyn
Film policier, mais pas que…
Dans New-York des années 1950, Fred, directeur d'une petite agence de détectives, est tué lors d'une enquête. Ses associés, une bande de patauds, poursuivent ses investigations.
Lire plus…
The Rider
la vision du Far West de Chloé Zhao, américaine d'origine chinoise, déroge aux règles du genre. Elle réalise un film impressionnant.
Lire plus…RBG
Projeté dans le cadre de Planète Femme(s) et en présence de Marie-Pierre Bernel, juge auprès du Tribunal cantonal vaudois.
Lire plus…
Un autre pays
Le roman de Baldwin Another Country ramène constamment au thème de l'altérité, dont la ségrégation raciale n'est qu'une forme.
Lire plus…Elle avait toujours beaucoup attendu de Rufus, et la couleur de la peau avait pour elle une importance considérable. Elle dirait: « Tu n'aura!s jamais regardé cette fille, Rufus, si elle avait été Noire. Mais tu ramasserais n'importe quelle ordure blanche parce qu'elle est blanche. Que t'arrive-t-il ? Tu as honte d'être un Noir ? »
p. 47
Sacrifice
Une excellente tasse de café qui laisse un arrière-goût amer.
Voilà l'image qui me vient en fermant ce livre.
Lire plus…
Pardon pour l'Amérique
Livre polymorphe que ce texte posthume de Philippe Rahmy. A 10 ans, il avait découvert Baudelaire grâce à une jeune fille au pair. Gaby l'aidait dans les gestes de la vie quotidienne alors que sa maladie des os de verre l'enfermait. Cette ouverture, plus exaltante que les anticipations d'un Jules Verne, pourrait expliquer la forme poétique des textes de Rahmy.Je cherche ma voix et je la trouve là où ça tremble, grince, gémit.
p. 260
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Boy Erased
Le film pourrait être considéré comme drame psychologique s'il n'était pas basé sur le récit autobiographique de Garrard Conley. Sobre, il dénonce les excès d'une société moralisatrice pour laquelle l'homosexualité est la résultante d'un comportement induit par des tares familiales (drogue, alcoolisme, indigence, drogue, etc). Lire plus…
L'origine des autres

Théodore Géricault, Étude d'homme, d'après le modèle Joseph (1818-19) dit aussi Le nègre Joseph
En marge de l'exposition Le modèle noir de Géricault à Matisse, l'essai dense de la romancière Toni Morrison permet d'enrichir la réflexion sur le racisme et la race. Sa notoriété de femme noire lui donne un certain crédit dans l'analyse de la construction de l'altérité. Dans une série de conférences prononcées à Harvard, elle étudie le rôle du Noir dans la littérature. Elle relève notamment quelques constances : “Dans une grande partie de la littérature américaine, quand l'intrigue requiert une crise familiale, rien n'est plus répugnant qu'un rapport sexuel consenti entre les races. C'est l'aspect consenti de ces relations qui est rendu scandaleux, illégal et abject." (p. 41).
Lire plus…Qu'est-ce que la race (en dehors de l'imagination génétique) et pourquoi importe-t-elle ? Une fois ses paramètres connus […], quel comportement exige-t-elle/encourage-t-elle? La race est la classification d'une espèce et nous sommes la race humaine, point final.
Alors quelle est cette autre chose : l’hostilité, le racisme social, la fabrication de l'Autre ?p. 25
Pardon pour l'Amérique
Sur des textes de Philippe Rahmy
Lire plus…Quel choc. Ce texte porté sur la scène qui brille comme un animal écorché: Le langage nu, éblouissant, insupportable, dévoilé. Le langage sans rien.
p. 307
If Beale Street Could Talk
Tish et Fonny s'aiment; ils recherchent un appartement pour abriter leur amour. La tâche n'est pas aisée pour un couple noir dans le New York des années 1970. Accusé de viol par un policier véreux, Fonny est incarcéré.
C'est en prison qu'il apprend qu'il va devenir père. Tish et sa famille se mobilisent pour tirer Fonny de sa prison. Cette lutte sert de fil conducteur au film. Le “méchant”, blanc, empêche au couple de vivre son bonheur. Ce renversement des rôles n'est pas totalement convaincant…
Lire plus…
Sunset Park
Lorsque mis sous pression Miles décide de revenir à New York, il ne se doute pas que son fidèle ami Bing lui propose un logement dans un squat foireux.
Lire plus…
CollectionMet
The Five points Met collection
Son hall central est une véritable ruche bourdonnante. les galeries qui donnent accès aux diverses ailes sont des lieux de passage qui font davantage penser à une station de métro qu'à un musée. Dès que l'on entre dans les salles d'exposition, il est possible de prendre plaisir à découvrir la diversité de la production artistique humaine. Notre guide Lonely Planet le signalait : visiter The Met se prépare comme un plan d'attaque. Nos voisins de la cafétéria (pas le meilleur endroit) évoquaient aussi les diverses options pour minimiser les coûts d'entrée.
Pour passer du Washington franchissant le Delaware à la fresque America Today de Thomas H Benton, des Roses de van Gogh au décor floral d'un portrait de Shah Jahan sur une miniature indienne, il est bien utile de profiter des trois jours consécutifs de validité du billet d'entrée.

Whitney
L'exposition Programmed: Rules, Codes, and Choreographies in Art, 1965–2018 permet de mesurer l'impact de la technologie et de la pensée computaionnelle dans l'art.

Marc et Macke
Érigé en 1914, le bâtiment n'étant pas initialement prévu à cette fin, l'accueil et la circulation dans ce musée sont quelque peu rébarbatifs. Lire plus…
Armenia!
Les quatre évangélistes, Vaspurakan Met collection

Eloge de la peinture
Peinture hollandaise au Met
The Met dispose d'espaces qui permettent de mettre en valeur ses immenses collections. Celles des maîtres hollandais du XVIIe s font partie des premières acquisitions de The Met avec des œuvres de Rembrandt, Hals et Vermeer.
Vermeer, Allégorie de la foi catholique
Lire plus…
DUMBO

Immigration - version politique

Immigration - version alimentaire

Freer | Sackler
Newseum
Site du musée qui a fermé le 31.12.2019 Lire plus…
National Gallery of Art
L'aile ouest, inaugurée en 1978, de l'architecte I. M. Pei présente des œuvres modernes et contemporaines. L'accrochage, dans l'une des tours, des 14 panneaux de The Stations of the Cross--Lema Sabachthani de Barnett Newman et dans la salle adjacente de magnifiques Rothko est particulièrement attirant.
Le site de l'institution mérite une visite : chaque œuvre est détaillée y compris les milliers qui n'ont pas la place d'être accrochées.

Le Tonneau magique
Treize nouvelles, chacune consacrée à des gens ordinaires, artisans fraichement immigrés ou installés de plus longue date.
La plupart de ces portraits publiés en 1959 sondent l'âme humaine et pas toujours sa meilleure part.
Lire plus…Le métro le conduisit jusqu'à la 116e rue, et de là, il s'aventura dans un monde obscur et sans repères. Il était vaste, ce monde, et ses lampes n'éclairaient rien du tout. Partout des ombres, souvent mouvantes. Manischevitz claudiquait en s'appuyant sur sa canne, ne sachant où chercher dans ces immeubles de rapport noircis, scrutant en vain à l’intérieur des boutiques à travers la vitrine. Il y voyait des gens, et ces gens étaient tous noirs - il n'en revenait pas.
L'ange Levine – p. 64-65
Lady Bird
En se créant une identité "Lady Bird" cherche à se faire accepter dans son lycée malgré ce qu'elle juge être des tares… La vie d'une lycéenne comme tant d'autres qui hésite entre conformisme et originalité. Saoirse Ronan (Christine Lady Bird) et de Laurie Metcalf (sa mère) sauvent par leur interprétation un film conformiste… Lire plus…
Pentagon Papers
L'intérêt du film est de souligner que le conflit entre la presse et la Maison-Blanche n'est pas contemporain à Trump… Certes, Nixon n'abuse pas de l'expression Fake News Media même s'il ne se satisfait pas du traitement de l'informations par certains d'entre eux. Lire plus…
African American Museum in Philadelphia
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Barnes Foundation

Museum of the American Revolution
Les aléas subis par la tente de campagne de George Washington sont prétexte à une dramatisation qui permet de glorifier la figure du Premier Président et interroge sur la distance critique de l'exposition…
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Longwood Gardens

Brandywine River Museum of Art

Andrew Wyeth, Kuerners Ban and Hill, 1941
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Le livre des Baltimore
Marcus Goldman a passé son enfance à envier sa famille de Baltimore. Il a toujours vu une préférence de ses grands-parents pour son oncle, sa tante et son cousin du Maryland dans leur luxueuse maison d’un quartier de privilégiés. Avec ses parents de la middle class, l’existence est certes confortable à Montclair NJ, mais dépourvue de ce panache, de cette audace qui leur permet d’accueillir Woody, enfant rebelle, en son sein.
Marcus, le narrateur, est devenu écrivain. Il a promis ce livre en hommage aux Goldman après le drame qui a frappé la famille.
Le roman de Dicker se laisse lire facilement, sans susciter l’enthousiasme. L’utilisation du Drame comme repère chronologique agit comme un efficace teasing. La structure gigogne de l’ouvrage, Marcus étant à la fois narrateur et écrivain, enfant ébahi devant la grandeur des Goldman-de-Baltimore et adulte survivant du Drame, est intéressante, sans que Dicker ne semble entièrement parti et oser rompre avec une certaine linéarité de son récit.
Critique sur vice-versa littérature
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Délivrances
Dès les premières lignes, le ton est donné. Le roman de Toni Morrisom est âpre, pour ne pas avoir le mauvais goût de dire qu'il est noir, comme le racisme dont il traite. Lire plus…Il n'a pas fallu plus d'une heure après qu'ils l'avaient tirée d'entre mes jambes pour se rendre compte que quelque chose n'allait pas. Vraiment pas. Elle m'a fait peur, tellement elle était noire, Noire comme la nuit, noire comme le Soudan. Moi, je suis claire de peau, avec de beaux cheveux, ce qu'on appelle une mulâtre au teint blond, et le père de Lula Ann aussi. Y a personne dans ma famille qui se rapproche de cette couleur. Ce que je peux imaginer de plus ressemblant, c'est le goudron; pourtant, ses cheveux ne vont pas avec sa peau. Ils sont bizarres : pas crépus, mais bouclés, comme chez ces tribus qui vivent toutes nues en Australie.
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