Canarias

La Gomera

C'est incontestablement à La Gomera que va ma préférence. Avec ses 372 km2, elle a précisément la taille du district de Morges . Pourtant, malgré sa taille modeste, elle présente une impressionnante diversité. Nous avons le plaisir de la découvrir en parcourant des ravines dont la couverture végétale dépend de la situation. Un des points forts de ce programme «en liberté» d'altai est l'étape en compagnie d'une guide. Cette opportunité, après quelques jours à Tenerife, est idéale. En effet, Audrey, qui a planifié notre séjour à La Gomera peut non seulement nous introduire à la culture insulaire, mais aussi répondre à nos inévitables questions après quelques jours de séjour dans l'archipel. Française d'origine, elle est passionnée par son nouveau lieu de vie dont elle a appris le silbo, le langage sifflé, permettant aux habitants de communiquer malgré l'éloignement. Fierté de l'île qui l'a fait reconnaître comme Patrimoine culturel immatériel, il est enseigné à l'école.
Il ne reste plus qu'environ 21'000 habitants sur l'île et l'on dit que désormais les Gomeros sont plus nombreux sur Tenerife que sur leur île. La desserte régulière par ferry ne remonte qu'à 1974; elle a fondamentalement changé la vie de ses habitants, particulièrement désavantagés pendant le franquisme, même si l'ensemble des Canaries était pauvre. Ces liaisons quotidiennes avec l'île principale permettent par exemple d'y étudier sans forcément quitter La Gomera.
L'initiateur de ce développement, l'armateur Fred Olsen est particulièrement actif. Il propose des forfaits à la journée qui permettent aux touristes en séjour à Tenerife de découvrir La Gomera. À l'arrivée du ferry en milieu de matinée, une colonne de cars s'ébranle pour faire le tour de l'île. Elle s'arrête aux restaurants propriétés de Fred Olsen pour les pauses. Les Gomeros ne profitent donc pas directement de ce tourisme.
Benchijigua Gomera

Benchijigua


Comme dans les autres îles, l'activité agricole tend à être abandonnée même si les différents micro-climats permettent une production variée allant des pommes aux mangues, en passant par les pêches, les avocats et les bananes. Cette désertion des campagnes fragilise la biodiversité en augmentant significativement le risque de feux de forêts.
Le sinistre de 2012 a touché plus de 10% de la surface de l'île et détruit de nombreuses pépinières visant à rétablir les espèces endémiques qui assurent le maintien des ressources hydriques. (
El Pais )
La laurisylve qui occupe 80% du parc national du Garajonay est magnifique. Dans cette "forêt de nuages", les mousses prolifèrent sur les troncs et vivent en symbiose avec les arbres. Houx à feuilles de lauriers, bruyères arborescentes, lauriers développent une dense couverture végétale. Cette luxuriance fait oublier sa fragilité : l'écosystème est très vulnérable aux animaux herbivores qui n'existaient pas sur l'île.
Sans être jamais très éloignés des axes de communication, les sentiers sont assez peu fréquentés. Nos logements situés pour la plupart dans les zones basses de l'île, nous permettent d'apprécier la spécificité des villages.
À Hermigua, les terrasses sont largement dédiées à la culture de la banane et la coopérative agricole est très active. L'école génère un important trafic routier; la plupart des enfants sont emmenés par leurs parents en voiture. Certains profitent des différents bars proches de l'établissement pour prendre le petit-déjeuner avant le début des classes.
Sur le chemin de Vallehermoso, le centre d'information du Parc du Garajonay présente divers aspects de la Gomera et mérite incontestablement un arrêt. En arrivant à Vallehermoso par les hauteurs, nous avons l'impression d'un centre animé entouré de hameaux bien entretenus. Les cultures sont plus variées et divers ateliers sont installés en bordure du village. Les places de la Constitucíon, au centre, et de l'église San Juan Bautista ont été réaménagées. L'impression est trompeuse : les bâtisses en ruine sont nombreuses, la population de 2018 est un tiers de celle de 1960.
La diminution de la population dans le hameau de Chipude est encore plus forte. Il est dominé par la Fortaleza, montagne tabulaire à l'aspect puissant avec ses faces crénelées, sur laquelle ont été découverts des vestiges archéologiques qui prouveraient l'existence d'un lieu d'un culte animiste guanche.
Tant que nous sommes proches de la (modeste) zone sommitale de l'île, nous éprouvons l'effet brumisateur des alizés, alternant chaleur et fraîcheur. Même dans cette zone moins asséchée par le soleil, les traces du grand incendie sont bien visibles. Depuis le (Alto de) Garajonay, point culminant de La Gomera à 1487 m, nous rallions le versant Sud bien plus aride. En faisant étape à Imada, nous descendons par le sauvage ravin de Guarimar jusqu'à Playa de Santiago. Ce lieu de villégiature, destiné à la population des Canaries ou d'Espagne péninsulaire, est tout proche d'un récent aéroport qui la relie à Tenerife et à Gran Canaria. Malgré son développement récent, la viabilité de cette station paraît précaire au vu des nombreux commerces fermés et à vendre.
La dernière étape, raccourcie grâce à un trajet en taxi, nous ramène à la ville principale de l'île. San Sebastian s'enorgueillit d'avoir été la dernière étape de Colomb avant sa découverte d'un nouveau continent. La centrale thermique qui dégage un sombre nuage en bordure de la localité interroge sur le modèle économique de ces destinations touristiques insulaires.

La Palma