Iran – trekking et patrimoine
Ispahan
Dans la cour de la Mosquée Royale – Masjid-e Shah – on mettrait aisément une centaine d’autobus et peut-être encore Notre-Dame. La place dont elle forme un des petits côtés fait cinq cents mètres sur près de deux cents. On y donnait autrefois de furieux tournois de polo, et ces cavaliers qui passaient au galop devant la tribune impériale, on les voyait plus petits qu’un O majuscule bien avant qu’ils n’atteignent le fond de la place.
Nicolas Bouvier, L’usage du monde, 1963
Ispahan – Masjid-e Jāmeh
Après une longue journée de bus, de l’Alborz au haut-plateau semi-désertique qui s’étire de la capitale actuelle à celle du Shâh Abbâs le Grand, c’est émerveillés que nous découvrons cette immense place véritable lieu de rencontre des soirées ispahanaises. Elle n’usurpe pas son nom de Maidān-e Naqsh-e Jahān, littéralement l’Image du monde.
Chaque parcelle de verdure, chaque muret est occupé par des groupes en train de manger dans la relative fraîcheur. L’atmosphère de ce lieu, la luminosité des coupoles des mosquées qui le bordent varient au fil des heures et, en le rejoignant par le dédale du bazar, il est toujours agréable d’y déboucher. L’imposante Mosquée royale, dont Bouvier décrit la fragilité due à une construction précipitée, possède deux porches, l’un sur la place royale, renommée place de l’Imam, et l’autre sur la cour de la mosquée. Cette dernière est en effet orientée de telle manière que les fidèles prient en direction de la Mecque. Alors qu’à l’extérieur une jeune femme fait un shooting de mode, nous sommes accueillis par un Mollah du Séminaire Islamique Naseriyeh pour un échange dans le respect mutuel. Il nous parle de sa fonction et des privilèges donnés aux mollahs.
La Mosquée du Vendredi n’a rien à envier à l’édifice “royal”. Elle est décrite comme un véritable musée historique, chaque génération ayant ajouté sa touche dès ses fondements en 841 ap. J.-C. Chacun des quatre iwans caractéristiques de l’architecture perse présente des décorations particulières, tantôt jeu de briques, tantôt mosaïques complexes. Les spécialistes apprécient aussi l’évolution de la calligraphie.
Ispahan – Masjid-i Sadr
Ispahan est de longue date une ville multiculturelle. La colonie juive daterait du temps de Nabuchodonozzor; une synagogue existe encore à Ispahan. La Constitution de 1979 reconnaît les Juifs et les Chrétiens comme des minorités religieuses. Les membres de ces communautés n'ont pas été persécutés. Toutefois il est attendu des Juifs qu’ils se distancient de la politique d’Israël.
Le quartier arménien est plus facile à trouver que les communautés juives. Il est situé autour de la Cathédrale de Vank et du Musée qui rappelle le génocide de 1915. Il semble en effet que cette communauté descende des artisans déportés de la province arménienne au XVIIe siècle par Shâh Abbâs pour construire sa nouvelle capitale. Au début du XXe siècle, fuyant les massacres de Turquie puis la révolution soviétique, de nouvelles vagues d’immigration arménienne viennent grossir la communauté existante. Les Arméniens ont la possibilité de fabriquer de l’alcool et d’en consommer pour autant qu’ils n’en fassent pas commerce avec les musulmans. Il semblerait même qu’ils puissent consommer du porc.
Les ponts historiques sur le Zayandeh rud dont le pont Ferdowsi, dans la partie sud de la ville offrent aussi un espace récréatif aux habitants. L'absence d'eau sous ses 33 arches en casse la magie; elle est aussi révélatrice des graves pénuries que subit l'Iran ( Le Temps).
Suite – Persepolis et Shiraz
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