Suisse

«On reste en contact»

«On reste en contact»
Il était une fois… – Joëlle Kuntz, Le Temps du 28 avril 2021


Dans sa chronique hebdomadaire du Temps, Il était une fois, Joëlle Kuntz aborde habituellement les thèmes d'actualité par une approche historique. Sensible aux relations de la Suisse avec ses voisins, son dernier ouvrage La Suisse ou le génie de la dépendance illustre les paradoxes de notre farouche volonté d'autonomie.

Suite à la rencontre entre le Président suisse Guy Parmelin et la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen à Bruxelles, lors de laquelle le représentant de la Confédération a promis de «garder le contact», la journaliste a décortiqué la sémantique de cette expression. Son texte faussement désinvolte traduit la contradiction entre une situation géographique centrale, une économie connectée et un désir d'indépendance politique.

Au fil des siècles, on a rompu le contact, on l’a repris, on a vécu dans cette fatale proximité géographique avec toujours cette double idée d’appartenir et de ne pas appartenir. La paix européenne, après la Seconde Guerre mondiale, a relancé notre tactique historique de garder le contact tout en ne le gardant pas, de se tenir à part tout en réduisant l’écart au maximum de nos intérêts.

Les commentaires d'une étude sur les meilleures stratégies pour diminuer l'impact du SARS-CoV-2 qui paraît simultanément dans Lancet, met en évidence les conséquences du manque de coordination entre États voisins. Que les pays insulaires obtiennent de meilleurs résultats sanitaires et économiques indique cependant que la porosité des frontières implique des contraintes qui restreignent de fait l'indépendance.

Liste des votations concernant la politique européenne (Swissvotes– Institut de science politique de l’Université de Berne)

Que ton règne vienne

Gonzalez Philippe, Que ton règne vienne : des évangéliques tentés par le pouvoir absolu. Labor et Fides, 2014.

L'enquête sociologique de Philippe Gonzalez “restitue l'ethnographie d'un objet religieux contemporain”. Cette approche permet à l'auteur de proposer un aperçu de la constellation évangélique en Suisse romande.
Ses observations détaillées l'amènent cependant à étendre sa recherche aux entrepreneurs de religion étasunien et à leur rhétorique qui influencent de manière plus active les mouvements évangéliques que les autres églises protestantes. Lire plus…

Peter usw

Lecoultre Alexandre, Peter und so weiter . L'Âge d'homme, 2020.

Opus décalé d'Alexandre Lecoultre sur un rythme très poétique. Les protagonistes, au premier rang desquels Peter, sont des marginaux évoluant dans le microcosme helvétique, autour d'un point de chute, le café du Nord.

Peter lit avec la difficulté, alors plutôt que de déchiffrer le journal, c’est comme ça qu’il se renseigne sur la pluie et le beau temps, en venant écouter les dames parler aux arrêts de tram. Lorsque le temps est incertain, ce qui est souvent le cas, il parcourt plusieurs arrêts, voire des lignes différentes, pour comparer et deviner l’évolution dans la journée.

p. 18

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Récits d'Helvétie

Ben Salah Rafik, Récits d'Helvétie, L'Âge d'homme, 2019.

Le recueil de nouvelles de l'écrivain helvético-tunisien, professeur de français dans le Canton de Vaud, est un pont entre deux mondes. Rafik Ben Salah décrit sa patrie d'adoption avec un détachement ironique, alors qu'une forme de nostalgie se dégage quand il est question de son pays d'origine.
Son écriture se décline dans un champ large, allant d'un lexique soutenu, voire précieux à des expressions régionales typées. Sensible à la musique de la langue, il joue volontiers avec les accords sonores. Ces jeux de langage masquent cependant un rapport complexe à la migration : malgré son statut social, il est toujours perçu comme étrange(r).

Au sortir de ce repas, j'avais le cœur crevassé. Je dis à ma compagne que je n'envisageais plus de rendre visite à ses parents. Parce que, comprenait-on ou ne comprenait-on pas, j'avais besoin d’un conseil paternel, pas d'un garagiste, moi, hein !
J'ai mis du temps à comprendre que c'était mon affaire et je remercie qu’on ne pas dit: c’est ton problème, comme il se dit trop souvent aujourd’hui. Je crois que j'eusse rompu bruyamment avec mes hôtes dont j’appris à connaître la faste générosité. Dans la société où je suis né, l'identité individuelle est encore en gestation. L'on mettra encore longtemps pour passer du Nous au Je, en dépit du Printemps qualifié d’arabe.

p. 23-24



Interview à la RTS du 21.12.2019


Les enfants du Platzspitz

Les Enfants du Platzspitz, de Pierre Monnard (Suisse, 2020), avec Luna Mwezi, Sarah Spale, Anouk Petri, Delio Malär, Jerry Hoffmann, 1h40.

On pourrait presque dire que la dépendance de Sandrine à l’héroïne est comparable à la dépendance de Mia à [sa mère] Sandrine.

André Küttel (auteur) et Pierre Monnard (réalisation)

À la veille des élections fédérales de 1991, les autorités bernoises et zurichoises décident de fermer les scènes ouvertes de la drogue qui signent l'échec d'une politique surtout répressive de la drogue. La stratégie de libéralisation dans des espaces restreints pour contenir l'expansion de l'addiction avait vécu.
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La Suisse et les nazis

Boschetti Pietro, Les Suisses et les nazis : le rapport Bergier pour tous, Zoé poche, 2010.

Séance de rattrapage : le petit ouvrage de Pietro Boschetti est déjà paru sous ce format en 2010. Il fait une brève synthèse des plus de 11 000 pages de rapports de la commission Bergier.
Il y a 25 ans, à l'occasion du 50e anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale, la presse israélienne revendique la restitution des fonds déposés en Suisse par des juifs morts dans les camps de concentration, les fonds en déshérence. Cette demande provoque une tempête, en particulier après l'intervention du Sénat américain et du Ministère britannique des affaires étrangères.

Tout se passe comme si la bonne marche des affaires avait prévalu sur toute autre considération. Les dirigeants des grandes banques ont défendu leur position en invoquant le principe de la «liberté des affaires ». Ils ne se sont pas posé la question de savoir si ces prestations contribuaient à faire tourner l’économie de guerre du Troisième Reich. Bref, pour eux c'était du «Business as usual».

p. 100

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Grand National

Buti Roland. Grand National. Zoé 2019.

Une écriture fluide, voire nonchalante, pour traiter de la Suisse contemporaine. Le ton tranche avec l'atmosphère dramatique du Milieu de l'horizon qui, se rapportant à la sécheresse de 1976, marquait la fin d'une époque ou, pour le moins, une césure dans la vie des agriculteurs.

La camionnette était garée sous un gros érable transformé en boule sonore. Des oiseaux piaillaient de concert avec une folle énergie, exactement comme s’ils jouaient à savoir lequel d’entre eux allait mourir le dernier d’épuisement. On aurait dit une clameur d'abandon et de désespoir.

p. 54-55

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Le veau et la diligence

Peter von Matt. La Poste du Gothard ou Les états d'âme d'une nation : Promenades dans la Suisse littéraire et politique. Zoé, 2015.

Le narratif est une composante importante de la constitution d'une unité nationale. Professeur émérite de littérature allemande à l’Université de Zürich, l’auteur est légitime pour décrypter cette construction de l’histoire suisse.
Singulièrement, il s’appuie sur l’iconographie pour déconstruire le mythe du Suisse, sauvage heureux dans sa montagne.

[Une] société est plus fortement régie par son imaginaire collectif que par les faits historiques. L'imaginaire ne se soucie pas de l’état de l’évolution historique. Si les faits le contredisent, l'issue n’en est que pire pour les faits eux-mêmes. Ni les résultats de la science, ni les arguments de la raison ne pèsent face à l'imaginaire collectif. Il exerce un pouvoir aussi puissant sur les êtres que les hormones. La Suisse n’est pas un Sonderfall mais elle a simplement un imaginaire particulier.

p. 58

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Chefs-d’œuvre suisses

Fondation Pierre Gianadda – Chefs-d’œuvre suisses – Collection Christoph Blocher

Blocher dit "prendre toujours des décisions instinctives quand il s’agit d’art". Sa collection montre une appétence certaine pour les scènes enfantines d'Albert Anker, artiste dont-il possède une centaine de peintures. Cet attrait pour l'enfance marque, selon le curateur Matthias Frehner, la volonté d'Anker d'illustrer le changement du statut de l'enfant avec l'instauration de l'école obligatoire (Constitution de 1874). Ces scènes réalistes, comme les portraits de personnes âgées, suscitent une émotion qui a probablement contribué à leur succès.
Autre pillier de la collection, les paysages de Hodler, Ces toiles, bien que plus symboliques, présentent aussi l'image de la Suisse éternelle qui domine toute l'exposition.

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