MW

Tezuka Osamu, MW. Delcourt, 2019.
MW delcourt
Les émeutes étudiantes des années 1960 ont aussi marqué le Japon. L'influence politique et économique des États-Unis y a été fortement contestée, ainsi que la mainmise du pouvoir conservateur.
L'ambivalence de Michio Yuki est révélatrice des failles de la société japonaise de ces années-là. L'enquête du mangaka Osamu Tezuka établit un parallèle entre la duplicité du héros et celle du monde politique.


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MW_Yuki
Une fuite de gaz toxique, le MW, conservé sur une base américaine de l'archipel des Ryukyu a causé de nombreuses morts sur Okinomafuné. Si Yuki en a miraculeusement réchappé, son comportement a été altéré, multipliant ses capacités cognitives et inhibant ses limites morales. Il se révèle un salaryman exemplaire, dévoué à sa banque et apprécié de ses collègues. Cependant, lorsque sa part sombre s'exprime, il se révèle cruel et n'hésite pas à tuer. Il avoue cependant systématiquement ses forfaits au prêtre Garai qui, secret de la confession oblige, le préserve. Une dépendance qui accentue le côté équivoque de l'ecclésiastique.
Les actes délictueux de Michio Yuki sont répréhensibles et sa volonté de se venger des conséquences de son exposition au MW en s'emparant de ce gaz, odieuse. Cette attitude fait écho au manque de moralité des autorités. En achetant le silence sur l'incident d'Okinomafuné, elles mettent en évidence la collusion entre les milieux politique et économique, une pratique répandue au Japon
mangaka tezuka
Yuki est souvent confondu avec son frère jumeau, artiste reconnu de kabuki, un genre théâtral dans lequel les rôles féminins sont tenus par des hommes. Tezuka représente les deux frères sous des traits androgynes. Un artifice pour aborder le thème de la sexualité, en particulier celui de l'homosexualité.
Les initiales MW qui désignent le gaz toxique qui a plongé Yuki dans la confusion évoquent aussi Man & Woman, une différenciation dont il aime à se jouer en se travestissant. Plutôt que pour réprouver les pratiques homosexuelles, Tezuka joue de ce double usage pour critiquer l'hypocrisie qui entoure les comportements intimes. Ce manga en forme de polar au rythme soutenu est avant tout une accusation de la politique nippone et, plus généralement, l'hypocrisie des moralisateurs. .

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