Cache de Grenelle
Du microcosme de cette adresse parisienne, Christophe Boltanski déploie une histoire du XXe s. Lionel Baier situe ses personnages en Mai 1968, le romancier superpose les époques comme le réalisateur accumule les objets dans la reconstitution du cocon familial.Ils habitaient un de ces hôtels qui portent généralement des noms de marquis ou de vicomte, au milieu de la rue de Grenelle. Étrangers à la noblesse et à tout ce qui s'y rapporte, ils ne faisaient pas pour autant partie du faubourg Saint-Germain qui, depuis Balzac, désigne moins un quartier qu'un groupe social, des manières, un air, un parler.
p. 17

Chacun adapte la forme qui lui paraît la plus efficace pour dénoncer l'antisémitisme, sa persistance et l'insécurité indélébile qu'il produit. L'exil, depuis Odessa pour les Boltanski, produit ses fantômes et invite à élaborer une histoire qui permet de surmonter les traumas.J'évolue à travers la Rue-de-Grenelle comme sur un plateau de Cluedo. Par une heureuse coïncidence, il y a autant de pions que de protagonistes. Hormis le colonel Moutarde, il est facile d'identifier qui peut exercer les rôles de Mademoiselle Rose, Madame Pervenche, Professeur Violet, Monsieur Olive ou Madame Leblanc. Je n'ai pas besoin de jeter mes dés. Je ne peux, en effet, avancer que dans une seule direction et je ne me déplace que d'une case à la fois, voire de deux si elles remplissent une même fonction, comme la cuisine et l'ex-salle à manger. Les appartements en enfilade - c'est d'ailleurs leur principal défaut - font l'économie des couloirs et n'offrent pas d'échappées latérales.
p. 72-73
Ensemble, ils allaient entamer une vie nouvelle sur une terre généreuse, accueillante, où tous les citoyens, quelles que soient leurs origines ou leurs croyances, étaient libres et égaux.
p. 67
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