Gurlitt – un bilan

Kunstmuseum Bern

La désignation du Kunstmuseum Bern comme héritier de la collection Gurlitt a représenté un défi conséquent. L'institution connaissait les soupçons qui pesaient sur ce legs. Des investigations étaient déjà en cours en Bavière sur la provenance des œuvres réunies à la faveur de la politique culturelle nationale-socialiste par le père du légataire.
Pour relever ce pari, le musée bernois s'est doté d'un département responsable du suivi des œuvres afin d'en déterminer la provenance et s'assurer de la légalité de leur transmission. Il mène ces investigations conjointement avec le Deutsches Zentrum Kulturgutverluste et l'État libre de Bavière.

Enquêtes qui aboutiront à la restitution de quelques œuvres (actuellement une quinzaine sur les 1600 de la collection) Ces démarches ont un coût et quelques toiles ont été cédées pour couvrir ces frais et ceux liés à l'héritage lui-même.
L'intérêt principal de ce « Bilan » est la présentations des procédés mis en place pour déterminer la provenance des œuvres. Plusieurs indices indiquent une volonté délibérée d'en masquer l'origine alors que d'autres manipu­lations peuvent être attribuées à des causes externes (notamment des changements de passepartout ou d'encadrement).
Dans cette affaire les critères légaux jouent également un rôle détermi­nant. La saisie, par le pouvoir fasciste, d'œuvres appartenant auparavant à des musées n'est pas considérée comme une spoliation, sauf si les pièces étaient en dépôt. Il est donc important de retrouver l'inventaire des institutions pour déterminer le statut de chaque pièce accaparée par l'État nazi.
Hildebrand Gurlitt a assurément tiré profit de la période fasciste pour faire prospérer son commerce d'art. En qualité de revendeur de pièces saisies pour alimenter les caisses nationales-socialistes il a eu un accès privilégié à l'art rejeté par le pouvoir.
En thématisant les conséquences de l'héritage Gurlitt, le Kunstmuseum Bern ouvre une fenêtre sur les coulisses des expositions artistiques : peu de tableaux sidérants de beauté, mais la rigueur intellectuelle d'une démarche voulue juridiquement exemplaire.

Guide de l'exposition
Le legs Gurlitt (de)
Elisa de Halleux pour Le Temps