Pour l'amour de Bethléem

Pour l’amour de Bethléem : ma ville emmurée. Vera Baboun. 2016, Bayard

Le livre témoignage de Vera Baboun offre un regard inattendu sur la Palestine. Alors que le Proche-Orient est généralement considéré comme le lieu d'un conflit entre juifs et musulmans, cette femme, qui a dirigé la mairie de Bethléem, affirme avec force sa foi chrétienne.
Elle rappelle que sa ville a toujours été dirigée par une Municipalité (à majorité) chrétienne. Jérusalem et Bethléem ne sont distantes que de 9 km mais l'enfermement, l'emmurement de la cité de la Nativité y rend la vie sans espoir. Les chrétiens, qui en ont les moyens, fuient la ville et émigrent. Par conséquent la précarité s'installe, la violence croit simultanément à l'islamisation de la population.
Pendant son mandat, Vera Baboun n'a pas cessé de dénoncer cette fatalité et de rappeler la souffrance de ses concitoyens. Le droit à l'éducation, le droit à la santé sont soumis au bon vouloir d'Israël qui décide unilatéralement de l'accès aux infrastructures de Jérusalem.
Sous prétexte d'assurer la sécurité de ses colons, il confisque les terres et barre l'accès des agriculteurs à leurs champs. Bethléem s'asphyxie.

L'emmurement est l'une des pratiques les plus radicales qu'une communauté humaine puisse endurer. Elle place les uns à l'intérieur de murs, et les autres à l’extérieur. A partir du moment où vous emmurez une communauté, vous créez un nouvel état d'esprit favorable aux comportements radicaux. Une situation anormale engendre un radicalisme anormal. Le radicalisme n'est pas seulement une opinion. C'est une violence concrète dirigée contre soi-même et contre les autres. Les femmes font partie de ces « autres ». Plus notre communauté sera soumise à la violence, à l'occupation, aux blocages, à l'emmurement, plus le radicalisme s'aggravera. Et plus les femmes seront opprimées.
Au contraire, si vous favorisez l'émergence d'un espace où règnent l'égalité des chances, la justice, une vie « normale », vous laissez place au développement d'un mode de vie non radical, tourné vers le monde. Un environnement sain génère une mentalité saine. Un environnement malsain, créé une mentalité malsaine.

p. 27–28

Vera Babouin s'est engagée sans relâche pour faire connaître cette réalité à l'opinion publique occidentale. Elle a aussi mobilisé la diaspora pour raviver son sentiment d'appartenance à une terre. Les Palestiniens, dont un grand nombre a émigré en Amérique latine, sont invités à revendiquer le droit à leur terre ou, ad minima, à visiter les églises et les sites historiques de leur pays d'origine. Cette tentative ambitieuse n'est pas dénuée de sens : c'est par la diaspora que l'identité du peuple arménien se maintient. et que le pays survit,
Par son courage et son engagement, Vera Baboun offre aussi un modèle de réussite aux femmes qui sont les premières victimes de la politique d'emmurement.

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