Avec les henros de Shikoku


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Kagawa, anciennement Sanuki, étant la dernière préfecture du pèlerinage des 88 Temples, elle est consacrée au nirvāna. Le premier sanctuaire – bien qu'à nouveau dans la Préfecture de Tokushima – est le Temple 66, Unpenj-ji, auquel on accède aussi par un téléphérique et c’est un public nombreux qui s’y presse. Les calligraphes sont très occupés : un groupe a délégué une responsable pour faire valider la visite de chacun et le jeune bonze se démène avec une pile de nōkyōchō.
Unpenji Temple

Dans l'enceinte d'Unpen-ji, l'« aubergine authentique »

Le groupe chante les sūtras au rythme de blocs de bois frappés et de cloches, alors qu’un couple a installé son chien sur une chaise et le photographie devant d'étranges aubergines. Des représentations qui jouent sur l'homophonie entre le nasu なす d'aubergine et le nasu 成す d'accomplissement. Des contrastes entre une piété et un esprit kawai souvent présents.
Symboliquement c'est le site le plus élevé du pèlerinage, à 897 m.; dans son environnement se trouve les statues grandeur nature des 500 arhats, les hommes qui auraient atteint le nirvāna. D'ici on se prépare à revenir à la vie quotidienne par un cheminement qui traversera un milieu plus urbanisé.
Dans cette région montagneuse, malgré la Tokushima Expressway, le dépeuplement est visible. C’est une chance d’y trouver le Okada Minshuku géré par Okada-san, 95 ans et beaucoup d’énergie. Il fait compléter la liste des visiteurs, encaisse et sert le riz. Il connaît les chemins et tient à préciser les détails des différents parcours. Les Japonais qui sont à table cherchent la conversation avec lui et il m’inclut dans l’échange en utilisant son téléphone et G*Translate.
Je progresse entre les temples 66 et 67 avec Teramoto-san, de Kyoto. Il a profité du long week-end pour visiter quelques sanctuaires de Shikoku et compléter le rouleau sur lequel il fait inscrire les calligraphies qu’il passe soigneusement au sèche-cheveux. Il craint que son pas soit trop lent pour moi, mais apprécie que je progresse avec lui dans ce sentier en descente. Serait-ce parce que le seul fait de cheminer sur un sentier suffit à qualifier un accès au temple de henro korogashi ?
Alors qu’il approche du terme de ce premier pèlerinage, il envisage déjà de le recommencer. Ces échappées lui offrent une respiration et lui permettent d’être en contact avec la nature ; une dernière appréciation que je ne partage pas entièrement, en raison des longs parcours asphaltés, même si je suis pleinement satisfait de cette expérience.

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